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Animaux sauvages captifs : 5 ONG et 26 parlementaires interpellent le gouvernement

Trois ans après l’adoption de la Loi contre la maltraitance animale, le 30 novembre 2021, 5 ONG et 26 parlementaires interpellent la ministre de la Transition écologique Agnès Pannier-Runacher sur son application. Alors que de nombreuses échéances arrivent prochainement, les dispositions prises par le gouvernement restent largement insuffisantes et la souffrance des animaux sauvages captifs s’accroît.

La Loi contre la maltraitance animale fait partie des avancées majeures obtenues par CAP et ses ONG partenaires lors du quinquennat 2017-2022. Depuis sa promulgation, CAP est très attentive à ce que ses dispositions soient correctement appliquées. 

En 2022, CAP a pris part à une mission d’application de la loi afin de dresser un état des lieux des dispositions prises depuis un an et des mesures laissées en suspens. Quelques mesures avaient pu prendre effet immédiatement, mais beaucoup d’autres nécessitent la promulgation de décrets d’application par le gouvernement, notamment par les ministères de l’Agriculture et de la Transition écologique. 

En 2023, nous avons publié un communiqué de presse avec nos ONG partenaires AVES France, Code Animal, la LFDA et QUATRE PATTES pour dénoncer le manque de volonté politique du gouvernement. Le ministère de la Transition écologique avait déjà pris beaucoup de retard dans la publication des décrets et restait muet sur les moyens déployés pour atteindre les objectifs fixés par la loi. 

Malgré de nombreux rendez-vous ministériels, l’application de plusieurs dispositions concernant les animaux sauvages captifs se fait encore attendre. Pire encore, certaines mesures risquent même d’être appliquées de manière contraire à l’esprit de la loi qui a pour objet explicite d’en finir avec la captivité des animaux sauvages pour le divertissement. L’absence d’action du gouvernement menace directement la vie et le bien-être de centaines d’animaux captifs.

La mobilisation collective des ONG et des parlementaires est plus que jamais nécessaire. C’est pourquoi, le 29 novembre 2024, à l’occasion des trois ans de la loi contre la maltraitance animale, CAP, AVES France, Code Animal, la LFDA, QUATRE PATTES, ainsi que 25 parlementaires ont décidé d’interpeller ensemble le gouvernement dans une lettre ouverte :

Madame la Ministre, 

Ce jour marque le troisième anniversaire de la loi n° 2021-1539 du 30 novembre 2021 visant à lutter contre la maltraitance animale et conforter le lien entre les animaux et les hommes. Nous, organisations de protection animale et parlementaires, célébrons cette loi historique, qui a acté des progrès majeurs pour la condition des animaux sauvages détenus en captivité en France.

Cependant, nous constatons, trois ans après l’adoption de la loi, qu’un certain nombre de dispositions souffrent d’une mauvaise mise en œuvre.

Tout d’abord, nous saluons l’effort budgétaire du ministère pour créer des places en structures d’accueil pour les animaux issus des cirques itinérants, en prévision de l’interdiction de la présence des animaux sauvages dans ces établissements en 2028. Néanmoins, ces efforts seront vains si la reproduction des animaux ne cesse pas immédiatement. Malgré l’interdiction de reproduction et de nouvelle acquisition entrée en vigueur il y a tout juste un an, les organisations signataires ont reçu plusieurs signalements de naissances de félins dans des cirques en 2024. L’âge des lionceaux et des tigreaux et la durée de gestation de ces deux espèces laissent penser que l’insémination aurait eu lieu après la date fatidique du 1er décembre 2023. Ces naissances sont d’autant plus inquiétantes qu’elles peuvent être susceptibles de nourrir des trafics d’animaux d’espèces protégées. 

Ensuite, la loi du 30 novembre 2021 interdit les spectacles de cétacés et le contact direct entre eux et le public. Ces interdictions entreront en vigueur le 2 décembre 2026. Cependant, dans l’arrêté du 28 juin 2024 pris par votre prédécesseur, la présentation au public des cétacés reste autorisée passée cette date, alors que l’esprit de la loi visait à mettre un terme à cette activité. Dans ce même arrêté, l’interdiction de reproduction des orques est actée, mais pas celle des grands dauphins, qui pourront toujours être détenus et reproduits dans le cadre de programmes scientifiques. Aucun texte de votre ministère ne vient préciser les critères permettant d’établir la liste des programmes scientifiques autorisés à détenir et élever des cétacés en captivité. Le rapport d’information sur l’application de la loi de l’Assemblée nationale (2022) précisait bien que « L’esprit de la loi étant de mettre fin à la captivité des cétacés dans les delphinariums, cette dérogation ne doit pas être utilisée pour contourner l’interdiction ».

Le nombre de places créées en refuges et sanctuaires ne permettra pas d’accueillir tous les animaux des structures itinérantes (cirques, montreurs d’ours et de loups), ce qui interroge sur leur devenir. Quand des solutions de placement sont proposées par nos ONG, elles sont ignorées, faute d’inciter les professionnels à se séparer de leurs animaux. De même, il n’existe toujours pas de projet de refuge pour cétacés. Les animaux risquent de finir leur vie dans des conditions inadaptées, ou pire, être envoyés à l’étranger. C’est ce qui semble se profiler pour les orques, qui pourraient subir un transport long et éprouvant vers le Japon, pour continuer les spectacles et finir leur vie dans des conditions encore plus mauvaises qu’en France.

Enfin, l’article 14 de loi du 30 novembre 2021 instaure le principe d’une liste positive des animaux sauvages autorisés à la détention par les particuliers et les élevages d’agrément. Cette liste doit énumérer les espèces non-domestiques dont la détention par les particuliers n’est pas problématique au regard de critères à définir, tels que le bien-être de l’animal, son statut de conservation, sa dangerosité, les risques pour l’environnement et pour la santé. En ce troisième anniversaire de la loi, nous déplorons vivement l’absence de texte d’application de cette disposition. Régulièrement, des saisies de servals, serpents, et même de lynx défraient la chronique. Ils s’échappent parfois de chez leur propriétaire, faisant courir des risques – notamment d’ordres sanitaire et sécuritaire – à la population, comme aux animaux eux-mêmes.

Face à ces constats, nous nous inquiétons du sort des animaux sauvages captifs concernés par ces dispositions. La loi avait pour objectif de changer notre rapport aux animaux sauvages pour mettre un terme à des activités qui leur sont néfastes. Malheureusement, trois ans après l’adoption de la loi, le sort des animaux sauvages dans les cirques, les delphinariums ou chez les particuliers reste incertain.

Nous, organisations de protection animale et parlementaires, vous demandons, Madame la Ministre, de faire appliquer la loi en respectant son esprit, qui est d’en finir avec la captivité des animaux sauvages pour le divertissement.

Nous vous prions de bien vouloir agréer, Madame la Ministre, l’expression de notre très haute considération.

Melvin Josse – Directeur de Convergence Animaux Politique
Christophe Coret – Président d’AVES France
Franck Schrafstetter – Président de Code Animal
Louis Schweitzer – Président de la Fondation Droit Animal, Éthique et Sciences (LFDA)
Elodie Gérôme – Directrice de QUATRE PATTES

Clémence Guetté, Vice-présidente de l’Assemblée nationale, députée du Val-de-Marne
Arnaud Bazin, Sénateur du Val-d’Oise, président du groupe d’études Animaux et société
Corinne Vignon, Députée de Haute-Garonne, ancienne Présidente du groupe d’études Condition et bien-être des animaux
Laurence Rossignol, Sénatrice du Val-de-Marne, ancienne ministre
Gabriel Amard, Député du Rhône
Guy Benarroche, Sénateur des Bouches du Rhône
Nicolas Bonnet, Député du Puy-de-Dôme
Louis Boyard, Député du Val-de-Marne
Aymeric Caron, Député de Paris
Samantha Cazebonne, Sénatrice des Français établis hors de France
Pierrick Courbon, Député de la Loire
Sébastien Delogu, Député des Bouches-du-Rhône
Brigitte Devesa, Sénatrice des Bouches-du-Rhône 
Emmanuel Fernandes, Député du Bas-Rhin
Marie-Charlotte Garin, Députée du Rhône
Emmanuel Grégoire, Député de Paris 
Bastien Lachaud, Député de la Seine-Saint-Denis
Claire Lejeune, Députée de l’Essonne
Marianne Maximi, Députée du Puy-de-Dôme
Marie Pochon, Députée de la Drôme
Sandra Regol, Députée du Bas-Rhin
Sandrine Rousseau, Députée de Paris
Danielle Simonnet, Députée de Paris
Ersilia Soudais, Députée de Seine-et-Marne
Anne Stambach-Terrenoir
, Députée de Haute-Garonne
Mélanie Vogel, Sénatrice des Français·es établi·es hors de France